Intervention d’Amandine Germain
Pas de réponse face à la crise actuelle
Le Département de l’Isère montre une bonne santé financière, héritée notamment des mandats qui ont précédé cette majorité. Le budget 2023 prévoit ainsi 57 M€ de recettes de fonctionnement supplémentaires liées d’une part aux recettes liées au taux des Droits de Mutation à Titre Onéreux (DMTO) que la majorité départementale a fait le choix d’augmenter l’année dernière, mais aussi à des recettes en très forte hausse de la Caisse Nationale pour la Santé et l’Autonomie. Pour autant, il est étonnant de constater que les dépenses de fonctionnement (+42M€) augmentent largement moins vite que les recettes, malgré le contexte inflationniste et une prévision de recettes très prudente. Alors même que la Droite évoque des dépenses sociales en augmentation continue depuis 10 ans, ce budget ne prévoit pas d’augmentation de ces dépenses pour 2023 ! Et pourtant, la période que nous traversons est incertaine pour notre collectivité certes, mais surtout pour les Isérois.
L’année 2022 a vu arriver la guerre sur le continent européen, et se solde par une crise énergétique qui succède à une crise sanitaire jamais vue, tandis que le dérèglement climatique affiche ses effets visibles et les inégalités économiques et sociales se renforcent encore comme l’atteste le rapport sur la pauvreté en France réalisé par l’Observatoires des inégalités paru mardi dernier. Les ménages doivent faire face à une forte inflation : leur panier moyen a augmenté de 14% selon 60 millions de consommateurs entre novembre 2021 et novembre 2022, le logement représente toujours le premier poste budgétaire lui aussi en augmentation et alourdi par le montant des charges. Pour qu’une personne seule vive décemment il lui faut 1600 euros nets par mois, et 3000 quand il s’agit d’une famille monoparentale d’après les estimations de l’Institut de Recherche Économique et Social.
Dans ce contexte, l’heure n’est pas au satisfecit et à l’autocongratulation sous horde d’applaudissements (qu’aiment pratiquer la Droite en hémicycle), mais appelle plutôt sérieux, décence, humilité et responsabilité.
Un budget du repli
Car le service public reste le premier rempart, et en premier lieu les collectivités locales, car ce sont elles qui assurent les services du quotidien et qui garantissent les premières des solidarités. Les élu-es du groupe UGES tiennent à saluer les agents du Département pour leur engagement et leur sens du service public. Les collectivités ont plus que jamais besoin d’un soutien fort de l’Etat. Il est urgent que le Gouvernement accompagne nos départements comme les autres collectivités, en leur garantissant dans le contexte actuel un bouclier plus résistant face à la flambée des prix de l’énergie, et plus largement une autonomie fiscale, garante de leur libre administration et de l’efficacité de leur mission auprès de la population (C’est le sens du vœu que le groupe UGES a proposé de partager en octobre dernier, auquel la majorité n’a pas souhaité s’y associer).
Dans une telle période, les élu-es UGES auraient souhaiter que la majorité de Droite fasse le choix de l’audace plutôt que du repli. Invoquer par les mots, comme la Droite le fait, la combattivité ne suffit pas. Les chiffres et les orientations prises trahissent malheureusement le décalage entre le discours et la réalité et attestent davantage d’une gestion peureuse que du volontarisme dont elle se targue.
Oui l’avenir est incertain, et c’est pourquoi la situation exige plus que jamais des collectivités robustes et combattives, visionnaires et audacieuses.
Oui l’avenir est incertain, et c’est pourquoi la bonne santé financière de notre collectivité conjuguée aux nouvelles marges de manœuvre présentées dans ce budget, nous oblige et nous engage auprès des Isérois, pour aujourd’hui comme pour demain.
Prévenir pour préparer l’avenir
Alors qu’un jeune sur deux vit aujourd’hui sous le seuil de pauvreté, que la précarisation s’est encore accentuée et qu’un nouveau prolétariat de service a vu le jour à travers les métiers de l’aide à domicile notamment ; alors que les parcours de vie sont plus chahutés qu’avant ; alors que les fins de mois sont toujours plus difficiles à boucler, nous attendons du Département, chef de file des solidarités sociales qu’il s’engage avec détermination et sans mollesse.
Car prévenir et préparer l’avenir est toujours plus efficace que réparer et toujours moins coûteux pour la société tout entière, nous avons le devoir de nous battre par les actes et pas simplement par les mots pour garantir l’égalité réelle de nos collégiens quel que soit leur lieu de résidence, pour accompagner dignement nos personnes âgées quel que soit leur niveau de revenus, pour protéger les enfants, les jeunes et nos concitoyens les plus vulnérables, pour lutter contre le mal logement et la précarité énergétique en réinterrogant la pertinence de nos dispositifs, pour contribuer à redonner du sens aux professionnels de l’essentiel comme à redonner de l’attractivité à leurs métiers. Les professionnels de l’aide à domicile, comme ceux du service public de la santé, du médico-social, de l’éducation et bien d’autres sont nombreux à évoquer le manque de reconnaissance de leur métier et le manque de moyens pour accomplir leurs missions avec sens et sérénité.
Pour que ces secteurs au cœur des solidarités restent attractifs, y travailler doit continuer à porter un sens, être source d’épanouissement et cela passe par une rémunération à la hauteur des enjeux en présence et des conditions d’exercice dignes sur le plan humain et social. Il est d’ailleurs malheureux que la majorité départementale évoque sans cesse les mots « contrainte » « contraignant » quand elle évoque les revalorisations de salaires. Chercher sans cesse à réduire les coûts du travail, comme le font tous les systèmes lucratifs, a fini par réduire la valeur économique du travail alors que nous avons le devoir de le réhabiliter sur tous les plans : humain, social, financier.
Une majorité dans le déni climatique et sanitaire
Alors que le dérèglement climatique s’est exprimé avec vigueur cet été, notamment à travers des incendies partout en France- et ici en Isère même s’ils étaient de moindre ampleur-, nous attendons du Département, chef de file des solidarités territoriales, qu’il s’engage sans réserve, sans déni sanitaire ou climatique et avec courage – dans des politiques de résilience et de soutenabilité alimentaire, sanitaire et climatique.
Car prévenir et préparer l’avenir est toujours plus efficace que réparer et toujours moins coûteux pour la société toute entière, nous avons le devoir de nous battre par les actes et pas simplement par les mots et de prendre des décisions courageuses pour accompagner la transition vers un modèle agricole soutenable et donner ainsi accès à tous à une alimentation saine, pour regarder la situation climatique sans catastrophisme mais avec la lucidité nécessaire aux choix rendus désormais urgents.
A ce sujet, les élu-es UGES ont été, comme de très nombreux isérois, catastrophés par les propos du Président du Département lors du dernier débat relatif à la Zone à Faible Émission (ZFE) lors duquel il a tenté de minimiser l’impact de la pollution sur la santé de la population, débat lors duquel il a maladroitement comparé les causes de mortalité en relativisant certains décès, allant même jusqu’à accuser ses contradicteurs de brandir des peurs. Santé publique France, organisme d’État dont la légitimité ne peut être contestée, précise que 4300 décès par an en Auvergne Rhône-Alpes sont dus à l’exposition aux particules fines et 2000 décès par an à une exposition au dioxyde d’azote !
Accompagner la mise en place de la ZFE ne devrait donc pas être une option mais une décision logique et responsable au service de la santé de nos populations, et sur ce sujet le Département aurait pu faire le choix d’accompagner précisément les habitants hors métropole – comme le font d’ailleurs le Département de la Seine Maritime. Donner de l’espoir dans l’avenir et aux jeunes, ce n’est pas mentir, d’ailleurs personne n’est dupe, c’est au contraire faire des choix audacieux, même s’ils ne sont pas toujours populaires, auprès de ceux qui bénéficient du système économique en place. Alors qu’un fossé générationnel inquiétant se creuse aujourd’hui entre les décideurs et une jeunesse inquiète pour l’avenir de la planète, et qui se détourne des modes d’expression traditionnels, à nous élus locaux de redonner confiance par des actes forts et engagés.
Avec un budget de près d’1,6 milliard d’euros, notre collectivité dispose de moyens financiers solides, notre collectivité est gérée, notre collectivité dispose d’une capacité d’entrainement du territoire, nous attendons que notre collectivité donne enfin la direction. Combattive pour aujourd’hui, audacieuse pour demain.